Notre Lhassa sera bientôt complètement détruite! Sauvons Lhassa!

Traduction de 我们的拉萨快被毁了!救救拉萨吧

Notre Lhassa sera bientôt complètement détruite! Ceci n’est pas une exagération!

Un touriste ayant récemment visité Lhassa publia le message suivant sur la plate-forme de microblogging Sina : « Aujourd’hui, il est clair que l’intention originelle pour Lhassa était d’en faire une ville touristique à l’image de Lijiang, luxurieuse et criarde à l’excès. Tous les commerçants, les auberges et tous les services artisanaux de la vieille ville ont dû déménager en banlieue de Lhassa, et ont été remplacés par des boutiques d’antiquités et des hôtels haut de gamme; tous les immeubles affichent la même façade identique. Est-ce que toutes les villes chinoises devront subir une même métamorphose stupide de style coréen? »

Parmi les photos envoyées par ce visiteur se trouvent les ‘Plans de projet’ du centre commercial ‘Barkhor Shopping Mall’, présentement en construction (à l’origine le siège du gouvernement du district de Chengguan, situé au nord-est du Barkhor sur la route contournant le temple de Jokhang, tout près de la rue communément appelée Barkhor qui se trouve à l’intérieur des limites de la vieille ville de Lhassa). Ces plans présentent une superficie de 150 000 mètres carrés, disposant de 1 117 places de stationnement souterrain. Ceci s’ajoute au « Spiritual Power Plaza », ouvert à la fin de l’année dernière, qui a été érigé au nord de la vieille ville de Lhassa et consiste en un gigantesque centre commercial résultant de la coopération entre les fonctionnaires et les hommes d’affaires locaux. La construction de ce centre ayant nécessité le pompage jour et nuit des eaux souterraines de Lhassa pendant plus de deux ans, les habitants sont terriblement inquiets et craignent que des fissures ou des gouffres apparaissent dans la vieille ville de Lhassa, entraînant des risques d’affaissement. En fait, de nombreuses fissures sont désormais visibles dans la vieille ville, tout comme des puits sans eau. Et aujourd’hui les autorités veulent construire dans un autre coin de la vieille ville un énième grand centre commercial et un autre stationnement souterrain… Est-ce que cela veut dire qu’il est déjà trop tard pour prévenir la catastrophe vers laquelle ces fantômes insatiables précipitent Lhassa?

Rappelons qu’en 1994, le Palais du Potala fut inclus dans la « Liste du patrimoine mondial » de l’UNESCO; mais dès 1996, le village millénaire de Shol, situé au pied du Palais du Potala, fut détruit et ses habitants déplacés. À la place du village, on construisit une place publique, semblable aux milliers d’autres places présentes partout en Chine, faisant ainsi la démonstration du pouvoir totalitaire de l’État. La destruction du village Shol défigura définitivement le Palais du Potala.

En 2000 et 2001, l’UNESCO inscrit sur la « Liste du patrimoine mondial » le temple de Jokhang et le Norbulingka en tant qu’ajouts au Palais du Potala, faisant de ces endroits, déjà sacrés en raison de leur valeur religieuse, historique et culturelle, un patrimoine culturel mondial. À ce titre, ces lieux bénéficient (du moins en théorie) de la protection appropriée. Malgré cela, en 2002, un monument en forme d’obus, célébrant la « libération pacifique du Tibet », fut érigé au centre de la place, faisant directement face au lointain Palais du Potala : ceci attrista profondément les Tibétains. En conséquence, le Palais du Potala reçu en 2007 de la Convention du patrimoine mondial un « carton jaune », accompagné d’une critique quant à la recherche excessive de revenus touristiques, d’un développement sauvage et le refus des autorités d’honorer leurs responsabilités et engagements. Le Palais du Potala risquait alors de perdre le titre de « patrimoine mondial ».

À ce jour, malheureusement, non seulement le développement touristique excessif du Palais du Potala se poursuit, même la vieille ville de Lhassa devient chaque année de plus en plus menacée sous les pas des millions de touristes dont le nombre augmente sans cesse. Dans sa poursuite du statut de « ville touristique internationale », la vieille ville change son apparence au point d’être défigurée par diverses modifications drastiques. Comme l’affirme l’artiste tibétain Kuang Laowu, « Face à l’attrait matériel et à la séduction du pouvoir, la singularité culturelle s’estompe peu à peu et l’uniformité urbaine s’impose partout. Derrière les signes d’une prospérité apparemment en plein essor, la vieille ville de Lhassa — depuis longtemps vidée de tout contenu — n’est qu’une fleur fanée, on n’y trouve désormais aucun des signes charmants de sa longue histoire ».

Il y a quelques années, Andre Alexander, un allemand s’étant pleinement engagé à réparer la vieille ville de Lhassa, a créé le Tibetan Heritage Fund (THF). De 1996 à 2002, cette organisation a sauvé près de 76 monuments historiques de Lhassa, révélant par le fait même à tous la terrible vérité : « Au début de 1980, le processus de construction de la ville détruisait systématiquement les bâtiments et quartiers historiques de la vieille ville. […]  Depuis 1993, 35 bâtiments historiques ont été détruits en moyenne chaque année. Si ce rythme se maintient, le reste des bâtiments historiques aura disparu d’ici quatre ans. » Comme leur excellent travail de restauration et leur témoignage contredisaient visiblement ceux tenant les rênes du pouvoir, ils furent finalement expulsés par les autorités tibétaines, avides d’enrichissement coûte que coûte.

Selon les plans du projet du « Barkhor Shopping Mall », l’objectif de rénovation du quartier de Barkhor est « de nettoyer, de dégager, de transformer et de moderniser ». Dans les faits, je comprends que la reconstruction de la vieille ville se divise en plusieurs zones : le centre de la vieille ville et la route qui encercle le Temple de Jokhang seront complètement détruits; tous les commerçants seront déplacés à l’intérieur du nouveau « Barkhor Shopping Mall ». Les habitants de ces rues seront entièrement déplacés vers la banlieue ouest de Lhassa, dans le district de Tolung Dechen. Les ménages optant pour un déménagement rapide peuvent obtenir de 20 à 30 mille yuan de subvention, mais refuser la délocalisation est synonyme de problème politique. J’ai entendu dire qu’un certain vieillard qui était réticent à déménager est devenu fou. Les appartements et les cours ainsi libérés ont aussitôt été utilisés pour y attirer des investissements : des bars, des hôtels, des magasins, des ateliers d’exposition de peinture viendront s’y installer. De grandes places seront aménagées dans les autres rues et ruelles de la vieille ville, comme c’est le cas en face du temple de Ramoché, et les habitants seront également relogés en banlieue. Au nord-est de la vieille ville, ancien siège du gouvernement du district de Chengguan, le « Barkhor Shopping Mall » est en construction. Les exemples sont innombrables.

Bien sûr, la rue Barkhor ne se videra pas : son importance religieuse est trop grande. Elle deviendra au contraire un lieu animé, mais n’existant que pour les touristes. Elle ne sera plus jamais cette rue où les Tibétains venaient s’incliner en priant lors de leur pèlerinage, et même si certains pèlerins continuent d’y faire des prosternations, ce ne sera que pour ajouter à l’amusement des touristes… Un désastre après l’autre, Lhassa chute dans une décadence tragique. Historiquement, Lhassa n’avait jamais connu de désastres miniers, et maintenant de tels accidents se produisent. Historiquement, la rivière de Lhassa ne s’était jamais asséchée, et maintenant le lit de la rivière s’assèche, faisant mourir les poissons. Historiquement, la vieille ville de Lhassa n’a jamais été une vulgaire attraction pour les touristes, et maintenant elle s’est transformée en une rue touristique telle qu’on en trouve à Shangri-La et à Lijiang. Est-ce que, prochainement, on nous obligera à acheter un billet d’entrée pour pénétrer dans cette version parodique de la « Vieille ville de Lhassa »?

Elle disparaît encore plus vite que les autres endroits; elle est submergée encore plus vite que les autres endroits. L’âme en peine, Andre Alexander avait écrit : « Chaque fois que j’y retourne, les vieux immeubles y sont visiblement moins nombreux, les pierres et les briques, les ruelles et les rues, même les chiens y disparaissent… » Et maintenant, la nouvelle ville de Lhassa, commercialisée par les grands bonzes au pouvoir, y prend forme. Dès lors, je perds ces parcelles de paysage du vieux Lhassa, que moi et tant d’autres avons profondément aimées. Dès lors, mes souvenirs du vieux Lhassa, tout comme les souvenirs de tant d’autres, sont recouverts d’une couche de béton. Comme un internaute le dénonçait : « Ils détruisent la vieille ville, creusent des routes, construisent des ponts, coupent la Kyichu, pompent l’eau souterraine… ces gens ressemblent vraiment aux incarnations des fantômes insatiables : tout ce qu’ils peuvent emporter, ils l’emportent; tout ce qu’ils ne peuvent pas emporter, ils le détruisent! »

Il convient de noter que, ces dernières années, les 121 immolations de Tibétains (à l’intérieur et à l’extérieur du Tibet) ont été le problème le plus important et critique pour les Tibétains. Bien que la communauté internationale n’y porte guère attention, ce problème est au centre même des préoccupations du gouvernement tibétain en exil, qui y concentre l’entièreté de ces efforts. Par le fait même, les autres catastrophes et risques auxquels est confrontée la société tibétaine ont été négligés, tels que la destruction imminente de la vieille ville de Lhassa. Si cela avait eu lieu par le passé, l’UNESCO pourrait à nouveau émettre un « carton jaune », mais personne n’y porte plus attention.

Cependant, le gouvernement chinois a fixé toute son attention sur ces immolations. Le 27 mai dernier, après que deux Tibétains se furent immolés entre le temple de Jokhang et le poste de police de la rue Barkhor (poste de police qui immédiatement fut élevé au rang de Bureau de sécurité publique de la vieille ville de Barkhor), l’« Hôtel Mandala » — dans lequel les deux Tibétains immolés avaient séjourné — fut réquisitionné par les autorités. L’hôtel devint le Comité de gestion de la vieille ville de Barkhor de Lhassa. Même la vieille ville de Lhassa fut renommée « Vieille ville de Barkhor ». Qu’il n’y ait jamais eu dans l’histoire de Lhassa une « Vieille ville de Barkhor » n’a pas d’importance : les autorités amorçaient précisément à ce moment leur rénovation à grande échelle de la vieille ville, elles faisaient ainsi d’une pierre deux coups, l’objectif de « maintenir la stabilité » s’accordant avec celui du réaménagement. Aujourd’hui, devant le temple de Jokhang ayant traversé les âges, les pèlerins en provenance des lointaines régions de l’Amdo et du Kang ne viennent plus se prosterner et les chambres qui auparavant étaient remplies des milliers de lampes à beurre jour après jour sont désormais vides. Il ne reste que les tireurs d’élite perchés sur les toits des maisons tibétaines et les soldats lourdement armés patrouillant sur la place principale, il ne reste que les immenses centres commerciaux qui ouvrent l’un après l’autre grâce à la corruption des autorités municipales, il ne reste que ces colonnes en plastique d’un rouge sang à l’entrée des centres commerciaux, signe de l’invasion et de la vulgarité des nouveaux riches.

Il y a quarante ans, lors de l’adoption de la « Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel », l’UNESCO déclara que « Quel que soit le pays auquel ils appartiennent, certains biens du patrimoine culturel et naturel présentent un intérêt exceptionnel qui nécessite leur préservation en tant qu’élément du patrimoine mondial de l’humanité tout entière, la dégradation ou la disparition d’un bien du patrimoine culturel et naturel constitue un appauvrissement néfaste du patrimoine de tous les peuples du monde, et ces biens doivent donc être communément protégés par l’humanité. »

Par conséquent, je demande à l’UNESCO et aux autres organisations à travers le monde de mettre fin à cette « modernisation » si terrible de la vieille ville de Lhassa, qui représente une faute impardonnable et incommensurable à l’égard du paysage, de la culture et de l’écologie de Lhassa!

Je demande aux nombreux tibétologues, aux spécialistes et aux institutions de tibétologie du monde entier de prêter attention à la ruine totale qui menace en ce moment même la vieille ville de Lhassa.

Je garde espoir que des gens de tous les horizons et de tous milieux organiseront des opérations pour sauvegarder la vieille ville de Lhassa!

Notre Lhassa sera bientôt complètement détruite! Sauvons Lhassa!

4 mai 2013 – 6 mai 2013

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Les médias étrangers enquêtant sur les immolations tibétaines

Traduction de Tsering Woeser : 唯色:去自焚藏地采访的外媒

Un après-midi froid à Pékin, où la qualité de l’air est tout aussi mauvaise qu’à l’habitude. Nous sommes assis dans un coin d’un quelconque café et notre conversation tourne invariablement autour de ce haut plateau couvert par la neige et les glaces. Nos yeux ne voient que les flammes ardentes, nos oreilles n’entendent que les cris en tibétain provenant du brasier, nos cœurs sont entrelacés de respect, de compassion et de chagrin, et d’une couche supplémentaire de cette douleur de chair et de sang. Car chacun de ces corps plongés dans les flammes est un de mes compatriotes.

Je discute avec un journaliste français du journal « Le Monde » et ses amis, revenus à Pékin la veille au soir. Pendant quatre jours entiers, ils étaient à Labrang et à Luqu, qui correspondent aux divisions administratives chinoises du comté de Xiahe et de Luqu, dans la Préfecture autonome tibétaine Gannan de la province du Gansu. Ils me racontent avec empressement leur visite des villes natales de trois Tibétains s’étant immolés en novembre de cette année.

Le journaliste du « Monde » déplie une carte, pointant les comtés d’Amuquhu, de Sangke et d’Ala marqués d’un signe, et me relate son périple clandestin dans ces villages éloignés, désormais remplis de véhicules militaires et de policiers. Nul ne les a invités à visiter cette contrée lointaine, ils durent donc demander de l’aide à des éleveurs locaux, afin d’être guidés secrètement jusqu’à la maison des immolés tibétains — aux risques et périls de leur guide. Tout cela pour s’efforcer d’exposer leur situation de plus en plus critique.

Évidemment, agir ainsi est extrêmement dangereux. Deux mois auparavant, le Bureau de la sécurité publique de la Préfecture de Gannan a émis un avis en tibétain et en mandarin, exigeant que l’on dénonce les « instigateurs clandestins » des immolations et que l’on rapporte tous les indices liés à celles-ci, promettant d’importantes récompenses en argent. Cet avis fut affiché dans les sept villes, comtés et villages de la Préfecture de Gannan. Les autorités allèrent même jusqu’à envoyer quotidiennement à tous les résidants un message texte identique promettant une récompense de 50 000 à 200 000 de yuan pour les dénonciations. Aux intersections de nombreux villages, ainsi que dans plusieurs monastères, des caméras de surveillance furent installées. Sur tous les lieux de travail, des officiers sont déployés et se relaient jour et nuit assis dans leur voiture, le moteur toujours en marche, à l’affût de tout Tibétain qui chercherait à s’immoler. L’ironie est que dans les sept mois précédant la publication de l’avis, seulement 6 Tibétains s’étaient immolés dans la Préfecture de Gannan, alors qu’après la publication, en un peu plus d’un mois, 14 Tibétains se sont immolés l’un à la suite de l’autre dans cette même Préfecture.

De plus en plus de Tibétains sont secrètement arrêtés. Le grand-père et le père du berger Gonpo Tsering, originaire du village d’Ala de Luqu, qui s’est immolé le 26 novembre devant le temple Dinggu, furent arrêtés dans les dix jours après l’évènement par les forces policières. Leur famille est toujours sans nouvelle d’eux. De même, une jeune femme tibétaine qui fut témoin par hasard d’une immolation fut arrêtée par les policiers. Et malgré cette « terreur rouge », beaucoup de Tibétains continuent à visiter les familles de leurs compatriotes qui se sont immolés, leur apportant des dons en argent et nature, afin d’exprimer leur respect. Parmi les deux Tibétains immolés du village de Sangke, l’un d’eux venait d’une famille très pauvre qui n’avait en tout et pour tout que quatre yaks et une douzaine de moutons. Les dons en argent reçus par cette famille se sont élevés à plus de cent mille yuan. Sa mère fit don de l’entièreté de cet argent au monastère et à l’école locale, affirmant qu’elle souhaitait élever ses deux jeunes enfants en ne comptant sur rien d’autre que sur son propre travail.

C’est là ce que rapporte le journaliste du Monde, enquêtant en secret sur la terre des immolés, rapportant des informations de première main sur les immolations tibétaines : c’est d’une importance majeure. En effet, parmi les médias étrangers qui ont enquêté tant bien que mal sur les immolations tibétaines se trouve également le journal français « Libération », l’hebdomadaire français « Le Nouvel Observateur », l’Associated Press, le magazine Time des États-Unis, la télévision australienne ABC, et d’autres encore. J’ai rencontré les journalistes français de « Libération » et du « Nouvel Observateur », qui sont allés par deux fois en Amdo, à Regong, rapportant des informations précises et des photographies précieuses. Le premier s’est rendu au village natal de Sonam Dhargey en avril de cette année. Le second a visité, à la fin novembre, le village natal de Tangzin Dolma. Ce journaliste planifiait à l’origine gagner la maison d’autre immolé tibétain, mais fut expulsé du village par des policiers en civil et armés.

Il s’agit du reportage — complet et précis — sur les immolations, paru le 25 décembre 2012 dans le journal français « Le Monde ». 14 pages à propos des immolations en terres tibétaines, à propos de Labrang et de Luqu, à propos des familles des Tibétains immolés et des photographies provenant des monastères locaux qui tirent les larmes des yeux!

C’est à chaque fois de plus en plus difficile. Face au blocus strict de toutes les zones tibétaines par le gouvernement chinois, les médias étrangers ne doivent épargner aucun effort pour se rendre au Tibet, sous le rideau de fer, afin de comprendre les circonstances des immolations tibétaines.

Cependant, l’écrivain chinois Ding Yifu, vivant aux États-Unis, a récemment publié un article qui explique les raisons pour lesquelles il « est resté silencieux sur la question des auto-immolations des Tibétains », dans lequel il affirme : « Le silence est d’abord et avant tout celui des médias. À ce jour, pas un seul média n’est allé enquêter sur une scène d’immolation, pas un seul journaliste ne s’est entretenu avec la famille ou les amis d’un immolé, pas un seul n’a émis de rapport détaillé sur les immolations ». Il ajoute avec confiance : « Je souhaite poser cette question : pourquoi les médias du monde entier ont-ils perdu toute capacité à se mobiliser? »

Cette accusation est non seulement fausse, elle est également irresponsable.

 

20 décembre 2012

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Qui est l’instigateur?

 
Traduction de Woeser, 是谁煽动的?

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En mars 2008, un nombre important de paysans et de bergers participèrent aux manifestations. Évidemment, plusieurs furent aussitôt arrêtés par les forces policières. Quelque temps après ces évènements, un journaliste d’une station de télévision locale rendu visite à un berger en prison. Adoptant le ton d’un interrogateur de police, il lui demanda : « Qu’est-ce qui t’a poussé à causer des ennuis? Qui est l’instigateur de ces manifestations? »

Portant l’habit orange des prisonniers, le berger réfléchit longuement, puis répondit sur un ton tout à fait honnête :

« L’instigateur, c’est la CCTV(1). À la télévision, on nous répétait chaque jour qu’à Lhassa il s’était passé ceci ou cela… c’est comme ça qu’on a appris que des manifestations avaient éclaté à Lhassa. Si nous ne nous étions pas soulevés, alors que les Tibétains de Lhassa, eux, se révoltaient au grand jour, ce serait un peu honteux, non? »

(1) : Télévision centrale de Chine (中国中央电视台), abrégée en CCTV.

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« J’ai pris le train pour aller à Lhassa »

Traduction de 唯色:“坐上了火车去拉萨……”
 
 

Dans le train de la ligne Qinghai-Tibet, rempli de touristes venant de partout en Chine, une chanson naïve, vieille de plusieurs années déjà, résonne encore : « J’ai pris le train pour aller à Lhassa ». Un fonctionnaire originaire de la province de Hubei m’a demandé, visiblement un peu mal à l’aise : en ce qui concerne la loi et l’ordre, comment se passent les choses à Lhassa? « Pour vous, c’est très sécuritaire. » ai-je répondu, en insistant délibérément sur le « vous ». Quelques jeunes personnes assises à côté, parlant mandarin avec l’imprenable accent de Pékin, écoutaient attentivement et m’ont demandé de m’expliquer. « Les rues sont pleines de policiers, en uniforme et en civil », répondis-je.

Le fonctionnaire est un homme qui comprend vite; il demande : « Les Tibétains trouvent-ils cela très gênant? »

Un jeune éructa aussitôt : « Est-ce qu’il y a un lien avec les deux ou trois auto-immolations de Tibétains? »

Apparemment, ils ont entendu parler des immolations, en dépit du fait que l’appareil médiatique du Parti ne l’ait mentionné que rarement et que les organisations du Parti à tous les niveaux ne permettent pas d’en parler ouvertement.

Je les regarde comme je regarderais des gens venus d’un pays qui m’est étranger : « Ce ne sont pas que quelques-unes. Il y a déjà plus de cinquante Tibétains qui se sont immolés, de tous les coins du Tibet, même parmi les exilés ».

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La résistance par l’art : immolation des Tibétains

 

 
 
Images tirées de : 
http://www.culanth.org/?q=node/543
http://preview.cartoonmovement.com/p/6049
http://www.tashinorbu.be/
http://www.freetibet.org/
 
Nous vous incitons à nous faire part de vos commentaires : ceux-ci seront traduits en Chinois et transmis à l’auteur Woeser.
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Le projet Tibet-Xinjiang : « Écrasez la voix de l’ennemi »

 

Traduction de “西新工程”:“把敌人的声音压下去”

Dès 2000, Jiang Zemin, alors dirigeant de la Chine, annonça qu’il fallait « écraser la voix de l’ennemi et diffuser la voix du parti et du pays dans des milliers de foyers ». Les autorités visaient alors tout spécialement la région autonome du Tibet, le Xinjiang, la Mongolie intérieure, le Ningxia, ainsi que tous les autres districts peuplés par les Tibétains et d’autres minorités ethniques, par la mise en œuvre d’un projet de radiotélédiffusion à grande échelle : le « Projet Tibet-Xinjiang ». En date de 2010, le gouvernement chinois avait investi dans le « Projet Tibet-Xinjiang » un total de 19,48 milliards de yuan, et cet énorme investissement augmente chaque année.

 Le « Projet Tibet-Xinjiang » fut qualifié par les autorités d’alors de « projet pour le bien-être du peuple » et de « projet qui profite au peuple ». En fait, même en effectuant une rapide recherche d’informations sur Internet, nous pouvons voir que dans les différentes réunions de ces districts et régions — où l’on ne cesse de souligner que le « Projet Tibet-Xinjiang » est la tâche politique la plus importante, la plus urgente et la plus essentielle — certains responsables s’expriment plus directement, en disant que le « Projet Tibet-Xinjiang » est en vérité un « projet politique ».

 L’objectif le plus important de ce « projet politique » est un déploiement à grande échelle d’émetteurs de forte puissance pouvant interférer avec les médias internationaux. Par exemple, dans l’ensemble du Tibet, ce système empêcherait les Tibétains d’écouter et de regarder Radio Free Asia et Voice of America et d’autres émissions de radio et de télévision diffusées par des organisations internationales impliquées au Tibet. En particulier, la mise en place de ces milliers de stations d’interférences vise à ériger un rideau de fer infranchissable par les ondes.

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Immolation

 

Nous vous incitons à nous faire part de vos commentaires : ceux-ci seront traduits en Chinois et transmis à l’auteur Woeser.
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« Chercher querelle », « petits détails », « établir l’autorité »

Traduction de 挑刺小事树权威

Pour dire la vérité, lorsque j’exprime une opinion contraire à celle des dirigeants tibétains en exil, même si c’est pour rappeler que le décompte des immolations doit remonter jusqu’à celle de Libai en 2009, j’ai une hésitation et une confusion sans précédent. Des voix me parviennent de l’extérieur des frontières qui affirment fortement et sûres d’elles-mêmes : en ces temps difficiles, nous devons serrer les rangs, il ne faut pas se chercher querelle, il ne faut pas influencer les grandes circonstances en raison de petits détails, c’est le temps d’établir l’autorité du chef, et non pas de le critiquer… Ce genre de paroles, pour moi qui vis dans une société dictatoriale, sont trop familières. Les dictateurs toujours s’appuient sur ce genre de prétexte pour exiger de la société qu’elle soit « unie dans la détermination, unie dans l’action, unie dans la discipline ».

Critiquer les dirigeants, cependant, devrait être une norme fondamentale d’une société démocratique. Réprimer de telles critiques, quels que soient les motifs et les raisons, est incompatible avec la démocratie. Une société démocratique d’âge mûr ne devrait jamais traiter les élus comme de « Grands Leaders », mais plutôt comme des objets qui nécessitent une constante surveillance. « Le président n’est pas fiable » est le point de départ des idéaux démocratiques, dompter le gouvernement et les dirigeants est la tâche fondamentale de la politique démocratique. Et à cette fin, il s’agit d’abord de la liberté de critiquer. Par conséquent, une société démocratique sera remplie de ce genre de grandes et petites « critiques » contre les dirigeants.

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Éradiquer l’éducation en langue tibétaine pour « préserver la stabilité

Éradiquer l’éducation en langue tibétaine pour « préserver la stabilité »

 Je me souviens encore du 19 octobre de l’année dernière, à Regong dans la province d’Amdo, lorsque plusieurs milliers d’étudiants et de lycéens ont quitté leurs écoles, levant au bout de leurs bras de petits tableaux noirs, sur lesquels était inscrit en caractères tibétains : « Nous avons besoin des cours de Tibétain ». Par la suite, dans plusieurs endroits d’Amdo, des districts de Qinghai jusqu’aux districts du Gansu, d’innombrables jeunes ont mis en branle un mouvement pour la défense de leur langue maternelle. Même dans l’Université centrale des nationalités à Pékin, plusieurs étudiants tibétains ont élevé leur voix.

 Je me souviens qu’à cette époque, plus de 300 enseignants tibétains ont fait parvenir aux autorités régionales du Qinghai une lettre, leur demandant de soutenir que la langue d’enseignement des étudiants tibétains reste leur langue maternelle et d’abandonner l’application du principe « le mandarin comme langue principale, le tibétain comme langue auxiliaire, le mandarin comme langue d’enseignement et le mandarin comme langue de l’éducation préscolaire ». Des Tibétains ont quitté leur emploi de cadre du Parti, les éducateurs seniors ont également envoyé des déclarations d’opinion semblables au Bureau du Front uni et à d’autres grands départements.

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« Les rayons de la liberté viendront éclairer cette terre d’espoir »

« Les rayons de la liberté viendront éclairer cette terre d’espoir »

Traduction de “自由的光芒来照亮这希望的大地”

Le 26 mars, une autre nouvelle de l’immolation d’un Tibétain nous est parvenue. Il s’agit d’un jeune tibétain du Kham, Jampa Yeshi, ayant quitté sa maison dans le Dawu pour fuir en Inde. À l’époque, lorsqu’il quitta ses parents, il n’avait que 20 ans. Il s’est immolé à New Delhi, où plusieurs centaines de Tibétains en exil protestaient contre la venue officielle en Inde du chef d’État chinois Hu Jintao, voilà pourquoi des images et des enregistrements de la scène ont rapidement fait le tour du monde. Certains ont surnommé l’immolé Jampa Yeshi de « torche humaine des droits de l’homme », utilisant le feu de son corps pour illuminer les ténèbres actuelles de notre monde.

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